L'aqueduc romain

Floursies - Bavay

(pour ne pas oublier son Histoire)

Sommaire
Page 01 Introduction Page 10
Les tournelles de Vieux Mesnil
Page 02 Ce que nos anciens ont écrit Page 11 De Vieux Mesnil à Bavay
Page 03 La Fontaine St Eloi à Floursies et les captages romains Page 12 L'aqueduc en chiffres
Page 04 L'aqueduc à Dourlers, Saint Aubin et Ecuélin Page 13 Canalisations en plomb
Page 05 La branche d'Eclaibes, Limont Fontaine et Ecuélin Page 14 Instruments de visée
Page 06 Secteur de Bachant et St Rémy du Nord Page 15 Principe du pont siphon
Page 07 Les bassins et piles à St Rémy du Nord Page 16 Les cartes
Page 08 La traversée de la Sambre Page 17 Contributeurs et ouvrages consultés
Page 09 Le mur de Boussières sur Sambre

L'aqueduc de Vieux Mesnil à Bavay

Une fois traversée la vallée du ruisseau du Bois du Mesnil, les traces de l'aqueduc sont presque inexistantes.
Heylen le fait passer à l'Est d'Hargnies, à travers le Bois de Louvignies, près du château d'Audignies, pour déboucher enfin par un canal de 6 pieds de haut et 2 pieds de large, dans les bassins du château d'eau de Bavay.
Masse indique son passage à l'Ermitage du Bois de Louvignies et en deux points indiqués sur son plan de Bavay, au bord de la route de Louvignies. Il nous donne les dimensions de sa section, tout en faisant des réserves sur ces mesures, qu'il n'a pu contrôler : 3 pieds de haut, 17 à 18 pouces de largeur.
S'il lui semble " incontestable " que l'aqueduc a traversé la vallée là où se trouve le château d' Audignies, sur des arcades qui auraient été entièrement détruites et dont on n'a jamais trouvé trace, nous pensons plutôt que la construction d'un tel ouvrage n'était pas nécessaire. Il est, en effet, facile à un canal souterrain, en suivant la pente naturelle du terrain, de passer du Bois de Louvignies à Bavay.
La découverte par Henault (1) d'un aqueduc à proximité de la route de Maubeuge vient confirmer notre hypothèse, tant par sa section : 50 cm de haut et 40 de large que par son niveau : aux environs de la cote 150.
Si nous reportons sur une carte les points de passage signalés par Henault et de Masse, nous constatons qu'ils se trouvent dans la bande de terrain située au-dessus de la cote 150 un peu au nord d'Audignies entre Bavay et le Bois de Louvignies.
Le point d'arrivée de l'aqueduc n'a pas été retrouvé. Logiquement, le château d' eau devait se trouver au sommet de la ville, c' est à dire sous les maisons qui se trouvent à la sortie de Bavay en direction de Maubeuge.
(1) Henault, Pro Nervia. tome 5, 2ème livraison.

L'entreprise Delsaux de Feignies exécutait en juillet de cette année 1962 un travail de voirie à Bavai dans la partie est du Vieux Chemin de La Longueville, à partir de la rencontre de cette rue avec la rue Notre-Dame. Elle posait des drains sous le côté nord du Vieux Chemin. Il fallait un regard au raccord de cette suite de drains avec ceux qui avaient été posés en 1956, sous l'autre partie du Vieux Chemin et dans la rue Notre-Dame. Les terrassements furent pour nous l'occasion de revoir, mais environ un mètre plus au nord, l'aqueduc que nous avions pu observer en 1956 (2).
Dans sa partie inférieure, la seule qui subsistait, cet aqueduc était semblable à celui d'Eclaibes, mais large de 38 cm et non de 32. Il constitue sans doute un branchement qui alimentait en eau un quartier de la ville antique sur lequel nous restons toujours sans autre document que ce bout d'aqueduc.


Conduit de l'aqueduc situé Vieux chemin de La Longueville
Conduit de l'aqueduc situé Vieux chemin de La Longueville.
On y voit très bien les briques triangulaires.

(2) H. Biévelet "J'ai rendu compte de cette découverte dans Égouts et Aqueducs Bavaisiens, Annales de la Soc. Royale d'Arch. de Bruxelles, t. 50, 1961, pp. 15 à 30, avec fig. de plans. Cf., sur les petits canaux à ciel ouvert trouvés un peu à l'est de l'ancien château de Louvignies, notre étude à la Fâche de la Bayette, Bulletin de la Sté Royale Belge d'Anthropologie et de Préhistoire, t. 67, 1956, PP. 55 et suiv., avec fig. et plans. Depuis que ces notes ont paru nous avons trouvé sur un « aqueduc » dans des documents appartenant à la Société Archéologique d'Avesnes, qu'avait bien voulu nous communiquer son président M. Jean Mossay, une coupure de journal ancien, qu'il ne nous a pas encore été possible de dater ; le titre même du journal n'était pas noté sur la coupure."

section d'aqueduc à ciel ouvert

C’est sur un mur de soutènement que le siphon remontait le versant gauche de la vallée en y décrivant un tracé longeant le coté Nord Est du vieux chemin de Bavay. A mis hauteur, son tracé est traversé par le chemin dit « des Quarante » avant d’atteindre le sommet du versant, là où le niveau du sol est à la cote 152,5.
A l’aplomb de cet endroit, le conduit devait se trouver à la cote 153, soit 0,500 m au dessus du niveau du sol.
A partir de ce point l’aqueduc avait encore 10,500 km à parcourir avant d’atteindre le centre de Bavay à la cote 149.
La pente moyenne entre ces deux points était donc de 153 - 149 / 10,5 = 0,380 m / km.
Après avoir franchi la vallée du ruisseau de Bois Mesnil l’aqueduc prenait la direction du Nord Ouest en continuant de longer le vieux chemin de Bavay jusqu’au croisement que forme ce chemin avec la D 117 sur le territoire d’Hargnies.
Puis il remontait vers le Nord en longeant la route de La Longueville sur environ 250 m, avant d’aller serpenter en direction de l’Ouest, entre les courbes de niveau 150 et 155, en louvoyant au sud du Bois de Louvignies, sur le territoire d’Hargnies. Plan N° 17
Il bifurquait ensuite en direction de l’Ouest. Son tracé se trouve là traversé par la route de Louvignies au lieu dit l’Ermitage où existaient autrefois des vestiges " que le vulgaire appelle Buise, surtout à l’Hermitage du bois de Louvignies " Claude Masse, Mémoire sur Bavai dans le pays de Hainaut. 1731.

Carte de Bavay réalisée en 1731 par Claude Masse
Carte de Bavay réalisée en 1731 par Claude Masse. Voir en grand format

Aujourd'hui rien n'apparaît plus sur ce secteur. Cependant sur le territoire d'Audignies, dans des champs situés au Nord de la bande boisée qui sépare la forêt de Mormal du Bois de Louvignies, apparaissent encore des lignes de pierrailles et de briquetage écornés chaque année par les labours.
Ces traces se remarquent à deux endroits différents. La première à une vingtaine de mètres au Nord Est de la route, dans un champ cultivé par Monsieur Francis Hoet. La seconde dans un autre champ attenant au précédent, à environ 200 m de la Ferme du Bois de Louvignies.
Monsieur Georges Bon est l'actuel exploitant de cette ferme. Il conserve dans sa cour une grande dalle de pierre plate à l'état brut, d'environ 2 m2, découverte dans son champ à proximité de l'endroit où émergent les vestiges de pierrailles.
Cette dalle avait probablement été amenée par les Romains pour servir au découpage de plaques plus petites destinées au recouvrement des conduit d'aqueduc. Plan N° 17 Fig 5.
Le conduit décrit ensuite un grand crochet de 350 m d'ouverture et profond d'environ 500 m.
Il traverse à 2 reprises la route de Louvignies avant de remonter en direction du Nord en se développant à proximité de la courbe de niveau 150, jusqu'au Sud de la route de Maubeuge au lieu dit la Crasse Cotte". Plan N° 14, Rep F et Plan N° 17, Rep O.

C'est au cours de l'année 1994 que furent mis en chantier, les travaux d'installation de l'échangeur qui devait permettre le contournement de l'agglomération de Bavay et le raccordement de la N49 à la voie rapide.
A cette occasion, furent exhumés des vestiges bien conservés, d'un tronçon d'aqueduc sur une longueur de plusieurs dizaine de mètres.
Maurice Henault avait déjà signalé la découverte de ce tronçon en 1930 "A proximité de la route de Maubeuge aux environs de la courbe de niveau 150"

D'autre part, l'endroit repéré F sur le plan N° 14 montre clairement le brusque changement de direction que fait l'aqueduc vers le Sud Ouest pour contourner la courbe de niveau 150 et garder la pente nécessaire à l'écoulement de l'eau en direction du centre de Bavay.
Dans sa notice Egouts et aqueducs bavaisiens, Musées Royaux d'Art et d'Histoire, Bruxelles, Henri Biévelet nous apprend que : le 30 octobre 1927, un sondage de 2 m de long sur 60 cm de large, très limité, on le voit, permis à M. Henault de voir des vestiges d'aqueduc dans "le talus du petit chemin particulier" qui joint la nationale 49 au Vieux chemin de La Longueville. "La partie de la maçonnerie exhumée, écrit il , Pro Nervia, IV, 1928, page 100, semble avoir formé l'un des cotés de l'aqueduc; sa hauteur moyenne est de 40 cm, son épaisseur 25 cm" Voir Rep E sur le plan N° 14.
Après le croisement que fait ce petit chemin particulier avec le vieux chemin de La Longueville, l'aqueduc décrit une grande courbe d'environ 300 m de longueur au Sud de ce dernier.
Au milieu de cette courbe, un vestige Rep D sur le plan N° 14, ainsi qu'un autre vestige repéré C situé un peu plus a l'Est.
Ces vestiges corroborent exactement avec les points repérés L sur le "Plan de la ville de Bavai dans la province de Hainaut en l'estat qu'elle estoie en 1731" Ce plan dressé par Claude Masse a été publié par Lucien Lemaire dans Mémoire de la Société Archéologique d'Avesnes, Tome X 1912.
L'examen de ce plan laisse clairement apparaître : "qu'à partir d'une vingtaine de toises de l'endroit où le chemin de terre arrivant d'Audignies, rejoint le vieux chemin de La Longueville, l'aqueduc suit celui ci jusqu'à la Porte de Mons appelée sur ce document, Porte de Maubeuge." Egouts et aqueducs bavaisiens. Henri Biévelet. page 23. Société Royale d'archéologie. Bruxelles.
L'auteur signale également à la page 19 du même ouvrage : "qu'à la rue connue sous le nom de vieux chemin de La Longueville, il existe des vestiges de deux petits canaux séparés de quelques 80 m seulement et qui diffèrent cependant assez les uns des autres, tant par la section que par l'orientation"


Croquis de l'aqueducs à Bavay.
Croquis des vestiges A et B réalisés par H. Biévelet en 1961

Aux pages 19 et 20 il décrit les vestiges d'un de ces petits canaux: "repéré le 27 novembre 1956, lors de la pose de tuyaux d'égout.... vers le point où l'axe de la rue Notre Dame, rencontre celui du vieux chemin de La Longueville. Au bout de la tranchée, large de 70 cm ... et à... 82 cm sous le niveau de la rue, nous découvrions bientôt des tuiles à rebords posées bout à bout suivant une direction Nord Sud. Les rebords des tuiles, larges de 4 cm ont une hauteur de 3,5 cm ou de 4 au dessus du plan qu'ils limitent. Celui ci a 38 cm de large. Vers l'intérieur... la maçonnerie... est faite de fragments triangulaires de briques rainurées, brisées selon leurs diagonales et maçonnées au mortier rouge. Ils ont une épaisseur de 4,5 cm environ, et la hauteur des triangles qu'ils forment varie de 16 à 22 cm... sur la longueur très courte que nous avons vue, la pente était de 1cm sur 10". Voir la situation Plan N° 14 Rep A.
Il décrit finalement la découverte de l'autre petit canal: " à 80 m environ, plus à l'Ouest, sur le coté Nord de la route... c'est la construction de deux maisons qui fut l'occasion de la découverte puis de la démolition d'autre vestiges de petit canal... mis à jour le 22 mai 1957 en creusant la place des caves. Sur les quelques mètres que nous les avons observé, l'intérieur du canal était détérioré; il paraît bien que le fond n'était pas garni de tuiles à rebords, ni les parois latérales faites de fragments de briques brisées. Le fond penchait légèrement vers l'Ouest, c'est à dire vers le centre de Bavai." Biévelet pages 21 et 23. Voir la situation Plan N° 14 Rep B.

"Qu'au Vieux chemin de La Longueville, ces vestiges aient été dépouillés des dalles de pierre bleue ou de grès ... qui les recouvraient ne doit surprendre: les Bavaisiens ont de tout temps, depuis 15 siècles, de récupérer ces matériaux facilement utilisables.
Quant à la direction que suivent les vestiges, et à la pente qui les affecte, elle prouverait qu'il s'agit non de l'aqueduc proprement dit, mais de l'un des branchements qui distribuait à travers la ville, son utile contenu."

L'alimentation en eau de la cité de Bagacum.
On remarquera encore à l'examen du plan n° 14 bis que Claude Masse a arrêté le pointillé représentant le tracé de l'aqueduc, à l'entrée de la Porte de Mons, désignée par erreur sur ce plan sous le nom de porte de Maubeuge.
A n'en pas douter, les Romains avaient prolongé le conduit d'aqueduc à travers toute la ville en y disposant, çà et là, quelques fontaines permettant aux habitants de Bagacum de s'approvisionner en eau.
On constatera, d'ailleurs, la présence de trois endroits portant le repère H, disposés intra muros, à même la rue qui traversait la ville de part en part.
Le premier de ces points se remarque à quelques dizaines de mètres de l'entrée de la ville. Les deux autres se situent en plein centre de la ville, toujours sur la voie principale.
Ces trois points H sont désignés sous le nom d'abreuvoirs dans le lexique figurant sur le plan n° 14 bis.
Il est évident que l'aqueduc était hors service en 1731 à l'époque ou fut dressé le plan, mais il est certain que ces points désignés par Masse sous le nom d'abreuvoir, étaient en fait des réservoirs aménagés sur les vestiges des fontaines que les Romains avaient installé dans la ville.
Reste alors la question de savoir comment ces réservoirs étaient alimentés en eau.

Après sa mort survenue en 1737, Claude Masse fut reconnu comme ayant été un sérieux statisticien et surtout un grand géographe.
Il n'est que de citer les 80 cartes dressant la frontière des Pays Bas et de l'Allemagne. Ou bien encore les 100 cartes de toute la cote de l'océan, depuis le Bassin d'Arcachon jusqu'à la baie de Bourgneuf, un besogné auquel il consacra 36 années de sa vie.

L'aqueduc à Bavay.
Arrivée de l'aqueduc à Bavay. Voir en grand format.

Les bains.
Certains passages de son Mémoire sur la ville de Bavay en 1701 font état de vestiges de bains qui subsistaient encore sur le site, peu de temps avant qu'il n'en ait reconnu les lieux.
Des extraits de son texte laissent, en fait, à conclure que le conduit de l'aqueduc avait été prolongé au delà de la ville jusqu'au secteur Ouest du périmètre de fouille.
"les vestiges des bains que les ouvriers m'ont assuré avoir détruit dans le jardin de la prairie des prêtres de l'Oratoire". Page 86
"C'était pour avoir plus abondamment de l'eau que dans leurs bains publics et en plusieurs autres particuliers" Page 88
"A Bavay où l'on découvre encore des vestiges de canal ou conduit qui écoulaient les eaux des bains et réservoirs dans le ruisseau de Louvignies" Page 97
Il faut également citer Maurice Henault qui parlait de "la ruelle des bains ou du chastelet" Cette ruelle existait encore avant le début des fouilles et était connue sous le nom de Rue des Bains ou Rue Rubens.
Témoin l'hypocauste thermal qui semble isolé des galeries souterraines à l'extrémité Ouest du grand ensemble.

Il y ait cependant raccordé par un sas à trois passages dont la largeur est délimitée par les cotés des murs de soutènement des réservoirs d'eau. Ceux ci s'élevaient dans l'étage supérieur et étaient alimentés par les eaux de pluie provenant des chéneaux de la toiture.
L'éventualité de l'épuisement des réserves d'eau durant les périodes de sécheresse avait amené les Romains à construire un troisième réservoir dont les vestiges des murs de soutènement existent encore sur le terre plein Nord du trapèze que forme le mur d'enceinte à cet endroit. A n'en pas douter, ce réservoir était alimenté par le conduit d'aqueduc qui fut prolongé jusqu'à cet endroit.
L'hypocauste était divisé en trois travées que délimitent deux rangées rythmées de piliers cruciformes simplement accolés aux murs de l'édifice, et reliés entre eux par des arcs de plein cintre.
Les quatre piliers centraux délimitent un espace complètement dégagé jusqu'au plafond, et qui ne comporte pas d'arcs de raccordement.
Un foyer en forme d'abside fait face à ce dégagement. Il comporte un décrochement qui permettait l'évacuation des fumées par un conduit de cheminée disposé entre la face extérieure de l'édifice et la face intérieure du mur d'enceinte.
L'air surchauffé s'engouffrait sous la partie centrale du plafond dépourvue d'arcs de raccordement et se glissait ensuite sous les caissons que formaient les lignes de piliers. Il communiquait ainsi ses calories, à travers le plafond dans la salle thermale qui le surmontait. (Suspensura)
Voir l'ouvrage Bavay la Romaine pages 15, 16, 17
Reconstitution graphique page 16 du même ouvrage.

Parcours de l'aqueduc de Vieux Mesnil à Bavay
Parcours de l'aqueduc de Vieux Mesnil à Bavay. Voir en grand format.

*Sommaire*