L'aqueduc romain

Floursies - Bavay

(pour ne pas oublier son Histoire)

Sommaire
Page 01 Introduction Page 10
Les tournelles de Vieux Mesnil
Page 02 Ce que nos anciens ont écrit Page 11 De Vieux Mesnil à Bavay
Page 03 La Fontaine St Eloi à Floursies et les captages romains Page 12 L'aqueduc en chiffres
Page 04 L'aqueduc à Dourlers, Saint Aubin et Ecuélin Page 13 Canalisations en plomb
Page 05 La branche d'Eclaibes, Limont Fontaine et Ecuélin Page 14 Instruments de visée
Page 06 Secteur de Bachant et St Rémy du Nord Page 15 Principe du pont siphon
Page 07 Les bassins et piles à St Rémy du Nord Page 16 Les cartes
Page 08 La traversée de la Sambre Page 17 Contributeurs et ouvrages consultés
Page 09 Le mur de Boussières sur Sambre

L'aqueduc à Dourlers, Saint Aubin et Ecuélin

Dès son origine, nous perdons la trace de l'aqueduc et c'est le patient travail de Chevalier qui nous permettra de le suivre jusqu'au " Mur des Sarrasins ", (restes d'un pont qui lui permettait de traverser la vallée du Ruisseau de la Braquenière).
Dans sa notice " L’aqueduc romain de Floursies à Bavay " 1833, l’historien décrit : "des sondages qui lui ont permis de retrouver le passage souterrain de l’aqueduc à Mont Dourlers près du passage de la route d’Avesnes, le long du chemin de la Croix où la dénivellation est encore visible et dans une pâture au Trieux Gaillon". Tous ces points sont situés entre les courbes de niveau 180 et 175. Le chemin de la Croix dont il est question dans cette citation est connu aujourd'hui sous le nom de rue d'Arouzies.
Le conduit devait franchir la vallée du Ruisseau de la Braquenière pour atteindre l'autre versant au sommet duquel se situe le "Mur des Sarrasins", vestige du mur de soutènement dont le niveau supérieur est à la cote 175,3. Le conduit qu'avait supporté ce vestige culminait à la cote 176.
Il est situé 500 mètres au nord de l'église de Dourlers. Ces ruines bordent un chemin vicinal sur une vingtaine de mètres. Elles sont constituées par le remplissage intérieur d'un mur, dont les parements extérieurs ont disparu. Larges d'un mètre, elles s'élèvent à près de deux mètres au-dessus du chemin, au niveau 175,35 (planche 2 ci-dessous). Plus à l'ouest, la base de ce mur affleure dans l'axe du chemin, sur près de soixante mètres.
Au point le plus bas de la vallée, le ruisseau est à la cote de niveau 159, soit une dénivellation de 7 m.
L'absence totale de vestiges ne permet pas de décrire avec précision le procédé qu'utilisèrent les romains pour franchir cette dénivellation. S'agissait il d'un pont aqueduc ou d'un siphon?
Les romains connaissaient le principe des vases communicants et maîtrisaient parfaitement la technique d'utilisation du siphon.
Cette dénivellation n'a pu poser le moindre problème aux hydrologues romains, sachant que l'aqueduc d'Alatri à 70 km de Rome construit en 90 avant JC comportait un siphon ayant une flèche de 100 m.
Il s'agissait donc probablement d'un siphon constitué de tubes de plomb, enjambant le ruisseau et qui épousait la dépression de la vallée.

Coupe de l'aqueduc à Dourlers par Chevalier.
Coupe de l'aqueduc à Dourlers par Chevalier.


Localisation satellite du Mur des Sarrasins à Dourlers.
Localisation satellite du Mur des Sarrasins à Dourlers.

Le siphon n'était certes pas posé directement sur le sol et devait être complètement isolé par un épais revêtement isolant capable de tenir le conduit hors gel en période d'hiver.

Le fond de l'aqueduc était quant à lui constitué par des briques longues de 50 cm, larges de 40, avec des rebords latéraux hauts de 10 cm. Sur ces rebords étaient disposées des briques carrées, rainurées sur une face suivant leurs diagonales (1) et formant le parement intérieur du massif de moellons bruts et de mortier qui constituait le canal. Il était couvert de pierres plates d'environ 12 cm d' épaisseur.
(1) Chevalier parle de briques triangulaires réunies par leur sommet, mais cette disposition nous fait plutôt penser à l'utilisation de briques rainurées semblables à celles dont nous avons découvert les débris à quelques kilomètres de là dans le Bois d'Ecuélin.
Quoi qu'il en soit, le franchissement de la vallée du ruisseau de la Braquenière constitue un intéressant sujet d'investigation pour les jeunes chercheurs amateurs d'archéologie.

 

Planche 2, croquis du mur des Sarrasins par René Jolin.
Planche 2, croquis du mur des Sarrasins par René Jolin et ci dessous, le même secteur par Maurice Gravellini

Mur des Sarrasins à Dourlers par M. Gravellini.


Carte des vestiges répertoriés à Dourlers par Chevalier. (1833)
Carte des vestiges répertoriés à Dourlers par Chevalier. (1833)

Il faut évoquer ici la découverte fortuite d’un tronçon de l’aqueduc faite en 1994 lors de travaux d’assainissement effectués par l’entreprise Morin d’Avesnelles à l’Est de Dourlers. La découverte a été faite à l’angle de la route de Floursies et de la grimpette désignée sous le nom de Grand Chemin là où le sol est à la cote de niveau 179,4. Plan N° 6.
Le dessus des plaques de recouvrement du conduit, était à environ moins 0,90 m du niveau du sol. Il est donc permis par déduction de situer le niveau du lit d’écoulement de l’eau à la cote de niveau 178 compte tenu de la distance qui sépare le dessus de ces plaques, du fond du conduit et qui est de 0,67 m.
Cette découverte n’a pas été déclarée en mairie. L’entreprise Morin a probablement redouté la suspension des travaux qui auraient permis une étude plus approfondie des vestiges. Ils ont cependant été longuement observés durant toute la durée des travaux par un riverain M. Pierre Tisseyre et également par M. Michel DeHost qui a déclaré l'avoir..."observé intact avec des parois en belles dalles en pierre bleue posées sur chant?... et recouvertes de dalles plates, également en pierre bleue....
L'excavation où ces vestiges se trouvaient enfouis a naturellement été comblée en fin de travaux. Ce tronçon d'aqueduc pourrait aisément être remis au jour et permettre une étude plus approfondie de sa structure.
L'aqueduc se développait donc au sud de la courbe de niveau 180. Il s'en éloigne progressivement pour garder la pente requise pour un bon écoulement de l'eau.

Le mur des Sarrasins à Dourlers.
Le mur des Sarrasins à Dourlers.

Le parcours de Floursies à Ecuélin. Maurice Gravellini
Le parcours de Floursies à Ecuélin.
Plan N° 6 de Maurice Gravellini. Voir en grand format.

La cote de niveau 180
Il n'a jamais été possible de situer exactement le circuit qu'adoptèrent les romains pour faire progresser l'aqueduc au delà du Mur des Sarrasins.
Des niveaux de terrain élevés se développent sur une ligne de crête, au sud du "Bois du Comte" et semblent avoir pu faire barrage à sa progression.
Les romains furent confrontés à ces obstacles qui culminent à la cote de niveau 180 soit 6 m au dessus du niveau requis pour mener à bien la progression.
Des prospections effectuées sur le terrain en vue d'identifier un éventuel passage souterrain ont finalement abouti à la découverte d'un secteur de prairie situé sur le territoire de St Aubin où subsiste un énorme monticule de terre, témoin du gigantesque travail qu'effectuèrent les romains pour ouvrir un passage en vue de faire progresser le conduit vers le Nord.
C'était une haute et large langue de terre, proche des actuelles cotes de niveau 180 avec lesquelles elle se raccordait. (Plan N° 6 ci-dessus). Voir surtout le plan N° 8 ci-contre représentant un extrait de ce secteur tel qu'il apparaît sur le plan IGN 2707 Est, Edition 1981 mais agrandi 15 fois.
Ce spectaculaire travail est resté en place après 20 siècles. Il apparaît toujours sous forme d'un énorme monticule de quelques milliers de mètres cubes de terre culminant au dessus du niveau du sol. Ce travail est d'autant plus surprenant qu'il fut exécuté de mains d'homme dans le seul but de ne pas avoir à percer un tunnel ou d'enterrer le conduit profondément.

D'autres part, pour éviter la construction du pont aqueduc qu'il eût fallu construire pour rejoindre ce passage en franchissant la vallée du ruisseau qui coule Nord Sud en direction de la rivière Tarsy, les romains firent progresser l'aqueduc vers le Nord Ouest entre les courbes niveau 175 et 180.

Plan N° 8 de Maurice Gravellini. Cote 180 à Dourlers
Plan N° 8 de Maurice Gravellini.

Ils lui firent ensuite contourner la source de ce ruisseau avant de le faire redescendre vers le Sud Ouest en direction du passage, repéré E, qu'ils avaient creusé dans la cote de niveau 180. Les plans N° 6 et 17 montrent qu'en fait, le parcours s'est développé entre les courbes de niveau 175 et 180 depuis le "Mur des Sarrasins" repéré D jusqu'au point de passage repéré E. La distance qui sépare ces deux points est de l'ordre de 2 km. La cote de niveau du conduit au point D est proche de 176.
Celle du conduit au point E est proche de 174. Soit une différence de 2 m pour 2 km et donc une pente de 1 m/km.
Après le point E l'aqueduc se dirige vers le Nord à travers le "Bois du Comte". Il contourne alors les dépressions du terrain, entre les courbes de niveau 170 et 165 en s'adaptant à son relief. Il passe sous le village d'Ecuélin entre les courbes de niveau 165 et 160 pour contourner le petit étang repéré F, avant de rejoindre l'extrémité Sud du secteur d'aqueduc reconnu par Vaillant et Haine sur le territoire de Bachant en 1963. Plans 6 et 17 repère G.
A l'examen de ces plans, il est important de constater que ce parcours est tout à fait conforme à la citation figurant dans les Mémoires de la Société d'Archéologie d'Avesnes en date de 1880 et qui précise que " l'aqueduc passe près du château d'Ecuélin et à l'Est de la Ferme de l'Hôpital".

Le réservoir de régulation
On notera que la distance séparant le passage repéré E du point où l'aqueduc contournait l'étang repéré F, est de 3 km. En E le conduit était à la cote de niveau 174 alors qu'en F il était à la cote de niveau 159. Il en résulte une dénivellation de 15 m sur une distance de 3 km soit une pente moyenne de 5 m / km. Une pente importante qui justifie bien qu'un réservoir de régulation ait été placé dans le cours de l'aqueduc comme l'a rapporté Z Pierrart dans son ouvrage Maubeuge et son Canton - 1851 page 254. "Non loin de l'Hôpital d'Ecuélin, à l'origine d'un ruisseau qui va se jeter dans la Sambre près de Bachant, se trouve l'un des réservoir où s'alimentait l'aqueduc romain de Floursies à Bavay."
Le Père Boucher ou Boucherius, qui au XVIe siècle a visité cet aqueduc, cite le réservoir de la ferme de l'Hôpital dans son ouvrage. Belgium romanum, page 502
En réalité, ce réservoir avait pour fonction d'absorber l'afflux d'eau provoqué par la forte pente du conduit en aval du point E, d'en déverser le trop plein dans le ruisseau aujourd'hui confluent de la rivière des Voyeaux.
Il régulait donc un débit d'eau compatible avec le secteur de conduit qui se développait ensuite sur les territoires de Bachant et de St Rémy du Nord et dont la pente moyenne était de 0,600 m / km.
Pour bien réaliser l'importance du débit de l'eau en amont du point F où avait été placé le réservoir, il faut réaliser qu'au confluent des trois sources que les romains avaient captées à Flouries pour alimenter l'aqueduc, le débit de l'eau est encore aujourd'hui proche de 100 m3 / heure.
En aval du réservoir trop-plein, le conduit progressait en direction du Nord sur environ 800 m entre les courbes de niveau 155 et 160.
Au point G du plan N° 6, il rejoignait à Bachant l'extrémité Sud du secteur d'aqueduc reconnu par J. Vaillant, P. Haine et J.L Boucly en 1962.


*Sommaire*